Les gestionnaires de la complexité

Bienvenue dans une réalité complexe!

Qu'il est loin le temps où l'on vivait en autarcie avec son village, où l'on vivait au rythme des saisons et des événements locaux. On savait où travailler et qui on allait rencontrer au marché. On connaissait la provenance de nos carottes ou de notre mobilier.
Les choses ont bien changé.
Dans un monde globalisé et en perpétuel changement sous l'influence de technologies accélératrices, nous voyons une quantité de biens de consommation, matériels ou immatériels, se déplacer sur toute la planète. On ne peut plus éluder la question de la complexité :
Ont-elles reçu des traitements chimiques susceptibles de porter atteinte à ma santé ou à celles des personnes qui les ont fait parvenir jusqu'à moi ? Ont-elles été acheminées par des moyens coûteux pour l'environnement (le fameux coût carbone...) ? Les oranges que je presse pour mon petit déjeuner ont-elles été produites par un paysan bien rémunéré ?
Si je me pose toutes ces questions, c'est que je suis déjà en résonance avec la notion de complexité. Je suis ouvert et témoigne d'une certaine aptitude à m'adapter : je tiens compte du contexte et je porte un regard critique qui augmenter la conscience de l'impact de mes actes ! Mais de là à faire évoluer mes pratiques il y a encore pas...

Qui n'a pas un jour expérimenté la difficulté de changer pour s'adapter ?

« J'ai toujours fait comme ça, pourquoi devrais-je faire différemment ? »
« Cela marche bien ainsi, pourquoi me demandez-vous de faire évoluer mes habitudes de travail ? »
« J'étais bien dans cette maison, je n'ai pas envie de partir à cause de ce voisin ! »
« Vous me dites ça, mais je ne vous ai rien demandé, moi! »

Si seulement c'était possible... Ne rien changer à son confort, à ses repères, à ses habitudes. Doux rêve, douce illusion, dont nous nous berçons afin de retarder la confrontation avec le réel. Or les situations que nous créons ne sont pas toujours tenables. Il en va de même avec la réalité planétaire actuelle, qui ne paraît pas vraiment durable : pouvons-nous par exemple imaginer bénéficier de biens de consommation à l'infini, sachant que la terre qui sert à produire ces biens n'est qu'un espace limité ? La réponse logique est non. Et pourtant, combien d'experts nous affirment tous les jours le contraire dans les médias? Ces experts ont-ils vraiment bien appréhendé la complexité des écosystèmes socio-économiques actuels ?
Dans la vie, nous n'avons pas toujours la possibilité de faire l'autruche et nous devons, souvent après une situation de crise, faire un grand saut dans l'inconnu, trouver de nouvelles ressources pour s'adapter. Il en va de même pour notre vie collective sur terre. Pour adopter un mode de vie durable, nous devrons d'abord faire face à une nouvelle donne, à une situation dite « complexe » parce que nous ne savons pas bien comment organiser nos propres actions et en maîtriser les effets directs ou indirects.
Alors que le mythe de la croissance infinie commence à perdre du terrain dans notre système de croyance, les citoyens-consommateurs qui s'ouvrent à la complexité se retrouvent d'abord un peu désorientés, anxieux et aux aguets, comme lorsque nous descendons de l'avion en terre étrangère, face à l'inconnu...

Mais qu'est-ce que la complexité, d'abord? La complexité peut être entendue comme l'interaction de plusieurs paramètres qui s'influencent les uns les autres. Alors que la culture universitaire dominante encourage la spécialisation, les sciences de la complexité étudient les phénomènes sous un angle global. Elles intègrent les interactions aussi bien de la matière (la biosphère) que des idées (la noosphère, sphère des idées et des croyances qui conditionne nos comportements). Le projet Ecopol ne peut exister que parce qu'il s'appuie essentiellement sur la culture de la complexité. Et parce que cette culture est mise au service de pratiques durables.

Les artisans de la gestion de la complexité

Gérer la complexité demande d'acquérir un ensemble de savoir-faire et compétences qui s'appuient non seulement sur des fondements scientifiques, chiffrés, vérifiables, mais aussi sur la connaissance des comportements humains, plus subtils et vivants. C'est en tout cas une discipline reconnue, en pleine évolution.
Cette compétence en gestion de la complexité est pratiquée par des consultants expérimentés. Les institutions publiques, les grandes entreprises, mais aussi les structures de milieux associatifs font appel à ces experts.
Cette approche commence à émerger un peu partout sur la planète. Dans certains groupes de travail, une réelle gestion de la complexité est nécessaire, notamment :

• pour les défis environnementaux (sécheresse, inondation, dans des lieux de guerre civile...)
• pour le groupe d'experts intergouvernemental sur le climat (GIEC)
• pour les entreprises gourmandes en énergie et contraintes à prévenir toute pollution ou assurer des économies d'échelles
• pour les partenariats public/privé visant à développer l'innovation entre plusieurs régions, les domaines d'activités ou les besoins sociaux.
  

Complexité et bien commun : suivez les guides !

Il existe des personnes compétentes pour nous aider à appréhender la complexité de notre réalité, pour mieux s'y adapter, de manière durable bien sûr...
On les appelle les transitioneurs, les acteurs du changement, les entrepreneurs sociaux et environnementaux, les entrepreneurs du bien commun, etc!

Autant de personnes ressources qui peuvent servir les intérêts de la collectivité en tant que guides, gourous (au sens traditionnel du terme), ou dictateurs bienveillants.

Souvent, ces agents du changement ont des parcours atypiques. On les reconnaît à leur côté autodidacte, à leur penchant pour la formation continue, à leurs capacités d'adaptation (avec plusieurs métiers dans une vie). Ils sont ouverts et curieux d'esprit. Ils se distinguent par une analyse des situations dans leur globalité. Ils ont développé une vision « transdisciplinaire » mais également dynamique de la réalité.

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Quelques concepts-clé pour les projets innovants qui intègrent la notion de complexité.
Accompagnement au changement : aujourd'hui tout change, l'essentiel est de l'accepter et de l'apprécier. S'adapter, ce n'est pas nier son individualité, c'est comprendre comment l'environnement fonctionne afin de trouver des partenaires pour coopérer et évoluer ensemble. Telle est la vocation des gestionnaires de la complexité. Incubation de micro-entreprises : petit oiseau deviendra grand dit le dicton, c'est le principe de couver, protéger et nourrir les œufs. C'est la notion d'autonomisation. Tel un jeune qui devient adulte, on se meut par soi-même lorsque l'on est capable de relever les défis de la vie en faisant appel aux bonnes ressources (personnes, idées, réserves...)
Ecologie industrielle : pratique récente du management environnemental visant à limiter les impacts de l'industrie sur l'environnement. Basée sur l'analyse des flux de matière et d'énergie, l'écologie industrielle cherche à avoir une approche globale du système industriel (bilan à 360°) en le représentant comme un écosystème et à le rendre compatible avec les écosystèmes naturels. Pérennisation grâce à un réseau large et diversifié : au delà de quelques années une idée transformée en activité d'entreprise trouve son rythme de croisière et devient suffisamment forte pour qu'elle donne tous les signaux de longue durée, c'est-à-dire pour qu'elle deviennent pérenne. Cela est rendu possible que si l'entreprise a su développer un large réseau constellé d'acteurs multiples et variés.

Une approche plus poussée de la complexité : la prise en compte du bien commun

La gestion de la complexité s'appuie toujours sur une démarche systémique qui prend en compte les impacts directs des actions. On peut ainsi gérer les problèmes de gaspillage d'une entreprise en valorisant ses déchets.
> L'approche systémique : une entreprise d'incinération ayant de fort rejets de vapeur d'eau peut entreprendre le recyclage de la combustion en énergie de chauffage.
Mais il existe une manière plus approfondie de gérer la complexité :
> L'approche écosystémique : l'entreprise d'incinération met en place une démarche de réduction des déchets à la source, en plus du recyclage de la combustion en énergie de chauffage.

L'écosystémie intègre les impacts directs et indirects, mais également tout le jeu des interactions potentielles.  Plutôt que d'investir dans une usine surdimensionnée, j'en fait une petite et je réserve les économies pour l'éducation citoyenne à l'éco-responsabilité. 

Plus on ouvre son regard, plus on prend en compte l'impact indirect de ses actes. On devient davantage conscient du bien ou du mal que l'on peut faire. La vision éco-systemique permet de préserver cette prise en compte de notre patrimoine commun et donc la vie humaine.
C'est cette vision qui sous-tend la cohérence du projet Ecopol.

Gérer la complexité, c'est d'abord définir une identité claire pour un groupe

La gestion de la complexité est essentielle notamment pour développer un projet tel que la création d'une ville ex-nihilo réunissant des pratiques durables et innovantes. C'est une qualité qui demande des compétences tant techniques que sociales. Parmi les étapes primordiales, il faut définir une identité claire pour un groupe, autour d'un certain nombre de mots-clé susceptible de fédérer des acteurs.

Voici une première ébauche de l'identité d'Ecopol, tel qu'un gestionnaire de la complexité, rodé à l'approche écosystémique, pourrait être amené à développer :
Mission : proposer un art de vivre globalement et entièrement durable, dans des centres protégés des concurrences déloyales provoquées par la dérégulation des marchés, qui soit susceptible d'inspirer les politiques privées et publiques en matière de gestion globale des ressources pour la durabilité de l'humanité.
Métier : animer un pôle d'écologie communautaire
Principes de fonctionnement et gouvernance : la culture libre, forme de sociocratie facilitée par la dynamique de traces numérique des contributions significatives (voir article gouvernance), du micro-entrepreneuriat et de l'économie d'usage, avec pour priorité le développement humain. Moyens : des contributions volontaires et des outils de gestion participative.
Valeurs : l'obligation de rendre des comptes tout en pratiquant les valeurs de l'économie sociale et solidaire, à savoir :

 * Bien-être social -> être plutôt qu’avoir, avoir le minimum nécessaire pour exister.
 * Citoyenneté -> chaque contributeur a une voix qui compte
 * Écologie -> produire pour vivre et non vivre pour surproduire
 * Autonomie -> autonomes mais pas individualistes
 * Solidarité -> 1 + 1 > 2
 * Diversité -> valoriser la richesse de nos différences
 * Cohérence -> dire ce qu’on fait et faire ce qu’on dit

Nous sommes tous invités à rencontrer la complexité

Pour monter et mener à bien un projet, ensemble d'éléments culturels très différents, il faut être capable de relier et de comprendre tous les aspects qui le compose. Même dans notre vie de tous les jours, nous sommes amenés à développer des compétences en gestion de la complexité.
Gérer la complexité, c'est être amené à comprendre la diversité, des réalités, des expériences de vie, des codes sociaux. En cultivant l'ouverture à la complexité, nous devenons plus adaptables, plus responsables de nos actions et donc plus heureux.

Sources:
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