Smala visite des écolieux et s'en inspire : Différence entre versions
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Version du 16 septembre 2013 à 17:22
Dans la friche industrielle de la Belle de Mai à Marseille, on a pu constater l’importance d’avoir des incubateurs officiels, qui accompagne les projets d’innovation et de créativité, que ce soit au niveau social, environnemental ou artistique, qui les met en réseaux, et qui facilitent les espaces et les dynamiques de coopération. On a été impressionné de voir à quel point ce lieu avait été transformé de manière cohérente grâce à cette dynamique d’incubation et de mise en réseau des acteurs, qui était consciente, en amont, et non pas basée uniquement sur le fait de mettre des locaux à louer à bas prix et de laisser l’offre et la demande d’exprimer, et d’avoir des gens qui ne sont pas nécessairement en bon voisinage parce qu’ils n’ont pas nécessairement choisi d’être ensemble, sur des projets.
Dans les friches, à Forte Petrazza en Italie, qui est un grand Fort longtemps contrôlé par la mafia, on a vu que la récupération de lieux qui avaient été controlés par des organisations criminelle constituait un très bon terreau pour faire refleurir des initiatives citoyennes, puisque ça ne pouvait pas être pire, et ça a suscité beaucoup d’espoir et ça laisse la porte à de nombreux possible.
L’expérience d’Artamis à Genève a attiré notre attention sur le danger de cloisonnement progressif des artistes, lorsqu’il n’y a pas de volonté de l’Etat, dès le début, de soutenir, d’incuber, et d’accompagner la qualité du lieu. Artamis nous semble finalement n’avoir été qu’un provisoire qui dure, basé sur une écoute faible, une absence de règles cohérentes, et des responsables qui ne pouvaient pas être légitimes, au vu du terreau d’anarchie qu’alimentait un Etat absent. On a vu les déviances que ça a généré en matière de conflits entre les usagers et les responsables des lieux en matières d’Etat de non droit et plus largement de démotivation des personnes bienveillantes qui se cassaient les dents sur des problèmes structurels, des conditions défavorables de gestion vu que rien n’était mis par écrit, compliquant ainsi les relation.
Nous avons observé la même situation à Piracanga au Brésil. Depuis 2003, on y apporte une participation relativement active dans le développement du tourisme, coaching, développement de micro-projets, appuis au lieu. C’est un couple et quelques amis qui se sont transformés en une soixantaine de maisons et entre 200 et 500 habitants selon le moment de l’année. C’est un lieu paradisiaque, mais là aussi, l’absence de règles mises par écrit a amené à ce qu’il y ait une faible stimulation pour que les gens s’impliquent activement, développent des micro-entreprises, autrement dit qu’ils innovent. Parce que, comme beaucoup de choses sont dans l’informel, quand il n’y a pas une culture de l’incubateur, il est difficile de s’impliquer plus activement.
Dans la plupart des lieux, dont notamment Piracanga, Forte Petrazza ou la Friche de Belle de Mai on a vu que ceux qui avaient une bonne situation géographique étaient capable de compléter leurs activités par des revenus touristiques, et plus largement, de mélanger des activités pédagogiques de formation ou d’art, avec du logement. A ce titre, ils étaient à même d’augmenter leurs propres revenus et d’offrir en même temps au public une expérience d’immersion dans le l’écolieu, pour le vivre de l’intérieur, co-vivre avec les habitants l’expérience de l’écologie communautaire, et non pas seulement passer la journée et rentrer dormir chez soi le soir.
A Attori Superiori, en Italie, avec qui on a un vrai lien d’amitié depuis de nombreuses années (il y a une photo qui existe qu’on a fait, c’est une mise en scène de Théo), on a vu à quel point le fait d’avoir des foyers indépendants pour les familles facilitait la dynamique communautaire et permettait de leur faire apprécier d’autant plus la communauté, dans le choix (et non pas l’obligation) qui leur était laissé de se retrouver dans les espaces communs. Ils pouvaient ainsi en permanence en sortir pour retrouver leur petit chez eux, leur gigantesque cuisine partagée, leurs petites cuisines et leurs petites salles de bains privées dans cette maison. Ce dédale de 160 pièces semblait donner une qualité de vie qui est exceptionnelle.
On a aussi vu qu’à Attori Superiori ils participaient à la vie de la commune, notamment en faisant partie du service des pompiers, et à ce titre, ils étaient bien intégrés et que cette intégration créait un climat de confiance et de collaboration avec les autres villageois qui n’ont pas fait un choix de communauté intentionnelle écologique et qu’à ce titre, le fait de rendre servir à sa localité, à sa région, était quelque chose qui créait une très bonne dynamique d’intégration d’un projet pionnier dans une région.
A Auroville, l’écolieu d’écologie profonde le plus grand, j’en ai retenu ces choses là: d’une part, l’indépendance législative et executive d’Auroville semble être un gros plus, pour qu’ils puissent développer des projets en ayant leurs propres choix locaux sur l’aménagement du territoire, sur la gouvernance entre police préventive et repressive, qu’ils puissent s’autogérer en profondeur. Par contre, ils ont une grosse épine dans le pied qui est quelque chose qu’il est important d’éviter en général, c’est d’avoir sur leur terrain (qui fait environ 10 kilomètre sur 10), des très petites poches, de l’ordre de carrés de dizaine de m2, genre 10 mètres sur 20, où ils ne sont pas propriétaires, dont ils ne possèdent pas la gestion, mais où s’y entassent des habitants de la région qui viennent en quête de travail parce qu’ils ont le réflexe de se dire: “tiens, parmi les 1800 aurovilliens, il y en a une bonne partie qui est de culture et situation économique occidentale et donc il y a de l’argent à gagner”. L’installation de ces gens empêche ainsi la mixité de se créer. Il y a de ce fait un choc culturel permanent entre des choix de vie écologique et puis tout à coup, quelques centaines de mètres, “bof”, une petite maison avec un autre mode de vie. Ce phénomène rend la cohérence de leur message très difficile. Par ailleurs, ils ont commencé à construire des petits lieux à gauche à droite sur ces 10 km2 mais ils n’ont jamais réussi à mettre en oeuvre leur plan urbanistique initial. Donc, ils ont eu un vers dans la pomme, dans le sens où il y a plein de petits villages, c’est très bien mais ça amène une dispersion des énergies et de la communication, ça a plus d’impacts sur la biodiversité, tous ces petits lieux, et au final ça complique la dynamique du groupe et l’interaction entre l’homme et la nature, et donc ils sont mal pris à cause de ça, ils ont pris l’habitude d’aller d’un endroit à l’autre en moto et donc ça pollue pas mal, même s’il y en a aussi qui vont en vélo. Il n’y a pas un habitat dense et compact qui serait cohérent pour un lieu durable et à ce titre ils ont manqué de fermeté au début et ils en paient le prix fort.
A Damanur enfin, en Italie, on a pu voir qu’on peut aller jusqu’à créer une dynamique de groupe suffisante pour que les habitants de la partie écolieu d’un village soit élue à la mairie et à ce titre président à la destinée du village de manière consensuelle avec des personnes qui n’ont pas fait le choix d’une vie écologique. Et donc, une approche mixte entre communautés intentionnelles et habitants individualistes est tout à fait possible.
On a aussi vu qu’il était possible d’avoir un supermarché avec uniquement des produits locaux,et que ça marche tout à fait d’avoir une commune où la cigarette est interdite même à l’extérieur, sauf dans les espaces privés des habitants.
On a enfin vu à Damanur, et plus largement dans de nombreux écolieux antroposophes, que le fait d’accueilir et de fournir des prestations pour des séniors, ou des personnes dans une situation de handicap, était un revenu honnête et utile, et qu’il était important de le regarder sous l’angle d’un double intéret de mixité social et de durabilité socio-économique, que ce n’était pas une honte, parce que finalement, selon comment on aborde ces choses, on ne fait pas de l’argent sur le dos des vieux et des handicapés, mais on partage bien une qualité de vie et on obtient un salaire juste pour ça.
Et la dernière chose qu’on peut dire c’est que, si les lieux comme Auroville, Findhorn et Damanur, mettent beaucoup en avant l’aspect spirituel, on n'y a jamais subi de prosélytisme de type “viens participer à un rituel” ou “paie pour visiter un de nos monuments religieux du lieu”. Au contraire, leur spiritualité est pratiquée de manière plutôt modérée et relativement oecuménique. Ce n’est pas du tout quelque chose qui est mis en avant, on n’est pas dans une situation sectaire et donc ça nous a aussi motivés.
On a aussi bien sûr visité des villes écologiques, ou on s’est immergé dans les peuples premiers. Concrètement on a même des membres qui ont une histoire de vie de type peuple premiers, comme la trésorière de l’association Smala qui a vu pour la première foi des éléments de base de la civilisation occidentale comme l’école ou les supermarchés vers la fin de l’adolescence, vers 17-18 ans. Avant, elle vivait dans un environnement où il y avait uniquement la nature, l’agriculture, le lien avec la terre, et elle a pu ensuite faire des études universitaires et donc, elle a un pied des deux côtés, et on a de nombreux membres qui font ces expériences en s’immergeant dans des lieux très naturels où il n’y a pas de civilisation moderne, qui se déconnectent pour de la méditation, pour des marches. On a par exemple un cohabitant qui a un statut d’avocat au Barreau du canton de Vaud et qui en même temps a fait des marches décroissantes, en allant de la Suisse à Rome à pieds pour réfléchir à son avenir. On a même des membres et sympatisants qui, après avoir visité des écovillages avec nous, sont partis au Népal à pieds avec un chien et deux ânes. Ce sont des sources d’inspiration pour nous, ça nous connecte avec les écolieux et la qualité de vie.