Méta-label intégré et pondéré

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Pour répondre à la problématique de la surpopulation et surconsommation quasi généralisées, cohabiter et respecter nos environnements sont devenus de vrais défis. Le monde moderne, numérique et globalisé, est aussi passionnant que complexe. Les risques d’effondrement brutal du système industriel ou financier sont aussi réels que les opportunités de transition collective vers une meilleure qualité de vie. Plus que jamais, la question du « vivre ensemble » se retrouve au cœur des enjeux de société.

Ils est donc magnifique et réconfortant de voir émerger des initiatives d'écolieux un peu partout : en Europe, on les nomme souvent écoquartiers.

Pourtant un dossier d'août 2013 de l'hebdomadaire romand grand public L'Hebdo, signé du journaliste Philippe le Bé, avait pour titre : « Ecoquartiers, enfer ou paradis ? » Il postulait notamment qu'il n'existe aucun service d'évaluation des qualités d'un écoquartier.

En effet, n'importe quelle promotion immobilière peut créer des lotissements qu'ils nomment écoquartiers. Le mot éco dans écoquartier est jugé acceptable grâce à une simple efficacité énergétique. Mais est-ce à la hauteur du défi actuel ?

Il est possible de mettre en place des critères formels qui incluent les relations sociales, économiques et culturelles du cohabitat. C'est ce « plus » qui est la base d'Ecopol.

Pour y parvenir, plutôt que de réinventer la roue en réinventant des critères, la démarche d'Ecopol s'articule autour des critères et outils existants, pour mieux les articuler ensemble. Elle aborde donc aussi des domaines connexes à la construction et à l'urbanisme, qui sont généralement les deux aspects centraux d'évaluation des écoquartiers.

Le cadre international d'évaluation le plus efficace au monde est certainement la boîte à outils des normes ISO, et les labels qui s'y rattachent. Il existe plus de 20 500 normes internationales ISO. Nous en retenons les plus pertinentes pour notre démarche.

Minergie par exemple, pour l'efficacité énergétique des bâtiments, est codifiée sous forme de normes ISO (n° 13790 notamment).

Ce qui est intéressant, c'est que certaines normes ISO traitent aussi de qualités sociales, comme le label Certimedia.org créé par d'anciens directeurs de radios et télévisions publiques (norme ISAS BCP, compatible avec la norme ISO 9001). Son but est d'aider les médias, radios et TV notamment, à proposer des programmes indépendant des intérêts commerciaux et politiques qui les financent, et donc au final à contribuer à une bonne qualité de l'information… y compris dans les cohabitats.

Citons aussi les normes ISO pour la prise en charge des personnes âgées, celles pour l'alimentation, etc.

Hors des normes ISO, de nombreux outils de gestion et d'évaluation facilitent l'adoption de pratiques durables en société. Exemple : les règles des espaces coworking inspirés du réseau THE HUB127 pour l'incubation de micro-entreprises socialement utiles, les règles d'organisation d'événements indépendants TEDx pour les idées inspirantes, la culture de décision participative dite « holacratie »128…

Si le but est de réunir de nombreuses normes et critères tant techniques que sociaux, on peut dire qu'Ecopol est un « méta-label ». Le terme méta symbolise ici la complexité du défi : assurer le bon usage de tous ces critères, ces outils et ces paramètres.

Le défi est relevé par deux moyens. D'abord la pondération. Pondérer ? C'est le principe de définir l'importance d'un élément (faible, moyenne, haute) dans une liste d'éléments. L'évaluation de la viabilité d'une communauté comporte bien trop d'éléments pour chercher à faire tout parfaitement dès le début. Mais ignorer de nombreux critères reviendrait à les rendre définitivement inapplicables, car une fois installés, les habitants d'un lieu acceptent difficilement que de nombreux nouveaux critères soient ajoutés comme condition à leur droit d'y vivre durablement. Si Ecopol propose un ensemble de critères très nombreux, la démarche est pondérée pour tous les évaluer chaque année, puis se concentrer sur quelques améliorations prioritaires.

Certains critères techniques et éthiques sont des prérequis (voir les articles suivants). D'autres s'appliquent seulement dans un deuxième temps, en complément, progressivement, par raffinements successifs.

Il existe déjà une démarche « intégrée » réunissant toutes (oui toutes !) les qualités d'une vie en cohabitat vraiment durable. C'est l'EVC (Evaluation de la viabilité des communautés, voir l'article du même nom ci-après). L'EVC est partiellement pondérée, mais pour être applicable, elle a besoin d'être réduite à 10-20 critères clés plus méthodologiques pour sa mise en œuvre par étape. C'est cette pondération et cette méthode de démarrage, d'incubation, que nous avons pu faire émerger en tirant les enseignements de nos 40 petites ruches créatives initiées de 1993 à 2013. De la complexité de cette expérience, nous avons proposé une méthode simplifiée.

Les critères de qualité d'Ecopol s'expriment donc en trois étapes :

1) quelques critères prérequis (énergie, immobilier et GEN),

2) quelques critères centraux (9 dans ce livre),

3) les critères plus fondamentaux de l'EVC, plus difficiles à adopter, vers lesquels tendre en 10 à 20 ans, tout en les ayant acceptés dès le début comme faisant partie des objectifs à long terme, avec une structure claire pour les aborder année après année.

La démarche Ecopol valorise donc le dispositif EVC, tout en y ajoutant des descriptifs très pratiques de bonne gestion d'un écolieu au quotidien : sa gouvernance, ses règles de fonctionnement, ses clés de succès.

En formalisant les aspects de relations sociales et économiques, les accords, le contrat social, les règles de cohabitation, on renforce la confiance dans l'écologie communautaire, ce qui permet d'aller plus loin que l'écologie du chacun chez soi.

Un exemple, volontairement très simple, qui montre les barrières que l'écologie communautaire peut susciter ou au contraire éviter :

Une dame nous appelle pour demander si l'on accepte les chiens dans un nouvel Ecopol en construction, pour lequel elle envisage de présenter sa candidature. Nous appuyant sur nos expériences et le règlement codifié qui en découle, nous lui répondons précisément : « On y accepte le premier chat (qui a pour mission de chasser les souris, sans blague) et c'est le premier chat qui accepte ou non les chiens et les autres animaux domestiques. Les animaux sont donc aussi à l'essai avec leur maître au début, et nous accueillons plusieurs animaux domestiques et de basse-cour (nous encourageons les poules, les lapins voir les moutons). Le critère de succès principal est le bon traitement des animaux par leurs maîtres, selon les conseils des sociétés de protection des animaux, qui renseignent sur les meilleures façons de les nourrir et les soigner. Problème principal rencontré : l'indisponibilité parfois des maîtres, amenant à ce que d'autres cohabitants aient pitié d'un chien laissé seul trop longtemps enfermé, et proposent de le promener, au détriment d'autres contributions volontaires. Vous pouvez éviter ce souci si vous avez assez de temps pour vous occuper de votre chien et de vos relations avec les cohabitants. Voilà, les critères de succès pour l'accueil d'un chien sont clairement identifiés ».

C'est une réponse précise, qui crée la confiance chez les personnes soucieuses de qualité de vie en cohabitat. Dans cet esprit, nous avons des réponses toutes aussi claires aux questions d'accueil d'amis, de partage de véhicules, de mode de calcul des loyers de logements ayant l'avantage d'être de plain-pied ...