La rupture technologique : Différence entre versions

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m (Analyse de cas concret : Facebook versus Google)
 
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=== Des ruptures qui s'imposent naturellement ===
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''rupture, technologie, usage, postmodernité, théorie du changement social.''
Au cours de ses milliards d'années d'existence, la planète Terre a connu de grands bouleversements. La disparition des dinosaures reste un exemple marquant de ces ruptures, dites biologiques. Conséquence d'un événement aussi soudain que décisif, cette disparition a été le prélude d'une nouvelle ère : une nouvelle donne du vivant.
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Ces bouleversements d'ordre biologique ont un écho dans le domaine technologique ; on parle alors de ruptures technologiques. Elles interviennent souvent suite à une innovation radicale. Dans ce cas-là, on assiste à un rééquilibrage des pôles de pouvoir, à un changement paradigmatique.
 
Une véritable rupture s'impose d'elle-même. Ce fut le cas de la roue, de l’imprimerie, de la radio, de  la télévision et, bien-sûr, d'Internet, qui a occasionné un véritable saut générationnel.
 
  
=== Analyse de cas concret : Facebook versus Google  ===
 
Comment est-il possible qu'un mastodonte comme Google, leader incontesté de nombreux secteurs clés du numérique en 2010 (moteur de recherche, régie publicité, géo-localisation avec GoogleMaps, agenda partagé, bureautique en ligne, courriels, etc.) se fasse damer le pion par Facebook, un nouveau venu ? Ce dernier grignote peu à peu les parts de marché de Google. Car Facebook propose une technologie qui construit un environnement de services, en tissant des liens entre les gens. Rien de sert d’être trop grand si on ne peut pas envisager la rupture technologique. Ici, c'est l'articulation sociale qui est au cœur de la rupture technologique. C'est le mode de fonctionnement ''social'' de la technologie et non plus la technologie.
 
  
=== Que nous réserve le numérique ? ===
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== Des ruptures qui s'imposent naturellement ==
Albert Jacquard aime à rappeler qu'''il faut se résoudre à l'idée que nous sommes assignés à résidence sur la Terre.'' Pour le siècle à venir, l'idée de déménager l'humanité sur une autre planète n'est pas très réaliste. Nous avons donc tout intérêt à préserver l'environnement de la biosphère. Et aussi celui de la noosphère. Car les idées sont plus vivantes si l'environement est fécond, créatif, fertile, ouvert à la différence. En verrouillant l'accès à l'information, on crée un environnement défavorable à l'esprit critique. C'est le cas de Google, qui centralise tout les services. alors que Facebook a permis aux utilisateurs d'ajouter des services dans son réseau social. C'est là une petite rupture socio-technologique, suffisante pour remettre en question la position largement dominante de Google. Les grandes technologies de rupture matérielles permettent souvent de renforcer la culture de citoyenneté numérique, même si au début elles servent souvent des intérêts militaires ou de grands groupes d'investisseurs, au détriment de l'utilité sociale. Parmi les ruptures bien connues, il y a par exemple le passage de la TV au PC, du PC au smartphone, du logiciel aux plate-formes de réseaux sociaux.
 
  
Aura-t-on des technologies qui nous permettent, comme l'envisage Bernard Werber dans son livre ''l'ultime secret'', de retranscrire nos pensées - la pensécriture- ou une Intelligence artificielle qui nous permette de nous décharger de la conduite d'une voiture, qui traduise simultanément une conversation ? Quoiqu'il en soit, il faut être attentif aux intérêts que serviront ceux qui sont les leaders de ces technologies de ruptures.  
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Au cours de ses milliards d'années d'existence, la planète Terre a connu de grands bouleversements. La disparition des dinosaures reste un exemple marquant de ces ruptures, dites biologiques. Conséquence d'un événement aussi soudain que décisif, cette disparition a été le prélude à une nouvelle ère : une nouvelle donne du vivant. Ces bouleversements d'ordre biologique ont un écho dans le domaine technologique ; on parle alors de ruptures technologiques. Elles interviennent souvent suite à une innovation radicale. Dans ce cas-là, on assiste à un rééquilibrage des pôles de pouvoir, à un changement paradigmatique. Une véritable rupture s'impose d'elle-même. Ce fut le cas de la roue, de l’imprimerie, de la radio, de la télévision et, bien sur, d'Internet, qui a occasionné un véritable saut générationnel.
Ces technologies peuvent jouer un rôle positif pour le développement humain. Elles peuvent servir le bien commun. cela dépend des produits que nous soutenons à chaque rupture technologique.
 
  
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L'idéal serait de développer un indicateur du degré de libération des technologies qui permettrait de voir si elles sont au service de l’humanité ou pas.
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== Analyse de cas concret : Facebook versus Google ==
Certains y travaillent déjà, informellement, en débattant des nouveautés technologiques sous l'angle citoyen dans des communautés telles que Linuxfr.org ou Slashdot.org
 
  
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Comment est-il possible qu'un mastodonte comme Google, leader incontesté de nombreux secteurs-clés du numérique en 2010 (moteur de recherche, régie publicitaire, géolocalisation avec GoogleMaps, agenda partagé, bureautique en ligne, courriels, etc.) se fasse damer le pion par Facebook, un nouveau venu ? Ce dernier grignote peu à peu les parts de marché de Google. Car Facebook propose une technologie qui construit un environnement de services, en tissant des liens entre les individus. Rien ne sert d’être trop grand si l'on ne peut pas envisager la rupture technologique. Ici, c'est l'articulation sociale qui est au cœur de la rupture technologique. C'est le mode de fonctionnement ''social ''de la technologie et non plus la technologie.
  
=== C'est l'usage qui génère la rupture ===
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== Que nous réserve le numérique ? ==
Le terme de « technologie de rupture » (Disruptive technology en anglais) fut introduit et argumenté par Clayton M. Christensen dans un livre publié en 1997 ''The Innovator's Dilemma''. Dans la suite de cet ouvrage, ''The Innovator's Solution'' Christensen utilise le terme plus générique d’innovation de rupture parce qu’il reconnaît que peu de technologies sont intrinsèquement de rupture ou de continuité. C’est au contraire leur usage stratégique qui a un effet de rupture.
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Albert Jacquard aime à rappeler qu'« il faut se résoudre à l'idée que nous sommes assignés à résidence sur la Terre ». Pour le siècle à venir, l'idée de déménager l'humanité sur une autre planète n'est plus réaliste. Nous avons donc tout intérêt à préserver l'environnement de la biosphère. Et aussi celui de la noosphère, pourrait-on ajouter ; car les idées sont plus vivantes si l’environnement est fécond, créatif, fertile, ouvert à la différence. En verrouillant l'accès à l'information, on crée un environnement défavorable à l'esprit critique. C'est le cas de Google, qui centralise tous les services, alors que Facebook a permis aux utilisateurs d'ajouter des services à son propre réseau social. C'est là une petite rupture socio-technologique, suffisante pour remettre en question la position dominante de Google. Les grandes technologies de rupture matérielle permettent souvent de renforcer la culture de citoyenneté numérique, même si, au début, elles servent souvent des intérêts militaires ou de grands groupes d'investisseurs, au détriment du corps social.
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Parmi les ruptures bien connues, on citera le passage de la TV au PC, du PC au smartphone, du logiciel aux plate-formes de réseaux sociaux.
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Disposerons-nous de technologies qui nous permettront, comme l'envisage Bernard Werber dans son livre ''L'ultime secret'', de retranscrire nos pensées – la ''pensécriture'' – ou d'une intelligence artificielle qui nous permettra de nous décharger de la conduite d'une voiture, qui traduira simultanément les conversations ?
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Il conviendra en tout cas de rester attentif aux intérêts que serviront alors ceux qui sont les leaders de ces technologies de rupture. Les technologies peuvent jouer un rôle positif pour le développement humain, elles peuvent servir le bien commun. Cela dépend des produits que nous soutenons à chaque rupture technologique.
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Il n'est d'ailleurs pas interdit d'imaginer la création d'un indicateur du ''degré de libération des technologies''.'' I''l servirait à vérifier si elles sont ou non au service de l’humanité. Certains y travaillent déjà, de manière informelle, en débattant des nouveautés technologiques sous l'angle citoyen dans des communautés telles que Linuxfr.org ou Slashdot.org.
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== C'est l'usage qui génère la rupture ==
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Le terme de « technologie de rupture » (''Disruptive technology ''en anglais) fut introduit et argumenté par Clayton M. Christensen dans son livre ''The Innovator's Dilemma'', publié en 1997. Dans la suite de son ouvrage, intitulée ''The Innovator's Solution'', Christensen utilise le terme plus générique d’innovation de rupture parce qu’il reconnaît que peu de technologies peuvent être effectivement dites ''de rupture ''ou ''de continuité''. C’est au contraire leur usage effectif qui peut avoir un effet de rupture.

Version actuelle datée du 20 août 2012 à 00:10

rupture, technologie, usage, postmodernité, théorie du changement social.



Des ruptures qui s'imposent naturellement

Au cours de ses milliards d'années d'existence, la planète Terre a connu de grands bouleversements. La disparition des dinosaures reste un exemple marquant de ces ruptures, dites biologiques. Conséquence d'un événement aussi soudain que décisif, cette disparition a été le prélude à une nouvelle ère : une nouvelle donne du vivant. Ces bouleversements d'ordre biologique ont un écho dans le domaine technologique ; on parle alors de ruptures technologiques. Elles interviennent souvent suite à une innovation radicale. Dans ce cas-là, on assiste à un rééquilibrage des pôles de pouvoir, à un changement paradigmatique. Une véritable rupture s'impose d'elle-même. Ce fut le cas de la roue, de l’imprimerie, de la radio, de la télévision et, bien sur, d'Internet, qui a occasionné un véritable saut générationnel.

Erreur lors de la création de la miniature : Fichier manquant

Analyse de cas concret : Facebook versus Google

Comment est-il possible qu'un mastodonte comme Google, leader incontesté de nombreux secteurs-clés du numérique en 2010 (moteur de recherche, régie publicitaire, géolocalisation avec GoogleMaps, agenda partagé, bureautique en ligne, courriels, etc.) se fasse damer le pion par Facebook, un nouveau venu ? Ce dernier grignote peu à peu les parts de marché de Google. Car Facebook propose une technologie qui construit un environnement de services, en tissant des liens entre les individus. Rien ne sert d’être trop grand si l'on ne peut pas envisager la rupture technologique. Ici, c'est l'articulation sociale qui est au cœur de la rupture technologique. C'est le mode de fonctionnement social de la technologie et non plus la technologie.

Que nous réserve le numérique ?

Albert Jacquard aime à rappeler qu'« il faut se résoudre à l'idée que nous sommes assignés à résidence sur la Terre ». Pour le siècle à venir, l'idée de déménager l'humanité sur une autre planète n'est plus réaliste. Nous avons donc tout intérêt à préserver l'environnement de la biosphère. Et aussi celui de la noosphère, pourrait-on ajouter ; car les idées sont plus vivantes si l’environnement est fécond, créatif, fertile, ouvert à la différence. En verrouillant l'accès à l'information, on crée un environnement défavorable à l'esprit critique. C'est le cas de Google, qui centralise tous les services, alors que Facebook a permis aux utilisateurs d'ajouter des services à son propre réseau social. C'est là une petite rupture socio-technologique, suffisante pour remettre en question la position dominante de Google. Les grandes technologies de rupture matérielle permettent souvent de renforcer la culture de citoyenneté numérique, même si, au début, elles servent souvent des intérêts militaires ou de grands groupes d'investisseurs, au détriment du corps social.

Parmi les ruptures bien connues, on citera le passage de la TV au PC, du PC au smartphone, du logiciel aux plate-formes de réseaux sociaux.

Disposerons-nous de technologies qui nous permettront, comme l'envisage Bernard Werber dans son livre L'ultime secret, de retranscrire nos pensées – la pensécriture – ou d'une intelligence artificielle qui nous permettra de nous décharger de la conduite d'une voiture, qui traduira simultanément les conversations ?

Il conviendra en tout cas de rester attentif aux intérêts que serviront alors ceux qui sont les leaders de ces technologies de rupture. Les technologies peuvent jouer un rôle positif pour le développement humain, elles peuvent servir le bien commun. Cela dépend des produits que nous soutenons à chaque rupture technologique.

Il n'est d'ailleurs pas interdit d'imaginer la création d'un indicateur du degré de libération des technologies. Il servirait à vérifier si elles sont ou non au service de l’humanité. Certains y travaillent déjà, de manière informelle, en débattant des nouveautés technologiques sous l'angle citoyen dans des communautés telles que Linuxfr.org ou Slashdot.org.

C'est l'usage qui génère la rupture

Le terme de « technologie de rupture » (Disruptive technology en anglais) fut introduit et argumenté par Clayton M. Christensen dans son livre The Innovator's Dilemma, publié en 1997. Dans la suite de son ouvrage, intitulée The Innovator's Solution, Christensen utilise le terme plus générique d’innovation de rupture parce qu’il reconnaît que peu de technologies peuvent être effectivement dites de rupture ou de continuité. C’est au contraire leur usage effectif qui peut avoir un effet de rupture.