La grande bascule
inversion, noosphère, biosphère, matériel, immatériel, société de l'information
Aujourd'hui, nous changeons de civilisation et entrons dans un nouveau paradigme, aux dénominations les plus variées : monde fini, ère numérique, société de la connaissance, société de l'Information… La marque la plus visible de ce nouveau paradigme, c'est l'inversion de certaines croyances fondamentales. Certains la nomme la grande bascule.
On croyait les ressources naturelles illimitées, on s'aperçoit qu'il n'en est rien. La planète montre les limites. Quant au partage du savoir, longtemps limité par la matière (l'impression des journaux sur papier, par exemple), il est devenu illimité grâce à l'électronique qui permet de diffuser toute connaissance pour un coût proche de zéro (par unité). Avant, la matière était abondante et l'information rare. Aujourd'hui, l'information abonde et la matière se raréfie. La grande bascule est à l'œuvre. De plus, il n'est plus possible de contrôler l'information. Seul le flux d'informations reste encore éventuellement contrôlable, par exemple pour influencer les opinions afin d'obtenir une majorité.
Cette inversion de paradigme bouleverse la vie sur terre. Elle modifie le fonctionnement de notre société, nos habitudes, notre lien avec la nature, nos croyances et nos aspirations. L'entrée dans l'ère numérique est le principal facteur de ce bouleversement. Soudain tout va plus vite, plus fort, plus loin. Et la question des limites resurgit. L'ancien monde matériel est fini, fragile et délicat. Il fait face à un monde d'informations immatériel, illimité et potentiellement tout-puissant. La noosphère devient plus dense et la biosphère toujours plus fragile.
Comment articuler harmonieusement ces deux composantes ? Comment mettre la noosphère au service de la biosphère ? Comment conjuguer au mieux mondes immatériel et matériel, pour réconcilier sciences et société ? En canalisant, pour commencer, la culture industrielle, afin d'éviter les gaspillages, et plus généralement en réduisant la volonté de toute puissance, souvent aveugle, de la science. L'homme a désormais à sa disposition un outil immatériel bien plus puissant encore : l'acquis représenté par toutes les découvertes du xxe siècle – sur les gènes, les atomes... Mais, si les promesses d'un tel bagage sont immenses, les risques qu'il renferme ne le sont pas moins. C'est pourquoi l'Internet, réseau social plus que technologie, nous offre non seulement des opportunités, mais aussi des responsabilités. Le moment est venu de réintroduire dans la pensée universelle les notions de durabilité, de spiritualité et d'éveil des consciences. Cela permettra d'assurer que les biens communs de base, tels que l'eau, l'air et l'information, demeurent disponibles pour tous, en toute équité.
La prise de conscience de cette grande bascule passe par la citoyenneté numérique.
Encadré : Ils ont dit
Eric Schmidt, PDG de Google de 2001 à 2011 :
« Le monde produit aujourd'hui autant de données en deux jours qu'entre l'aube de la civilisation et 2003. »
Albert Jacquard, généticien français, citant Paul Valéry :
« Le temps du monde fini commence. »
Encadré : Paradigme
Un paradigme est une représentation du monde, une manière de voir les choses, un modèle cohérent de vision du monde qui repose sur une base définie[1].
Sources et notes
Annexes
Liens externes
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